top of page
IMG_6980_edited.jpg

Fenêtres sur intérieur soignant

En janvier 2022, je quittais temporairement mon atelier d’artiste pour commencer une formation d’aide-soignante.

 

Pour aller chercher une énergie nouvelle, à l’extérieur. Pour vivre avec les soignants ce « monde d’après ». Pour me mettre à risque dans un univers dont je ne connaissais ni les codes, ni les compétences, ni les outils, ni le rythme.

Après avoir vécu intensément cette année, en tant qu’artiste, je souhaite partager le regard que j'ai posé de l’intérieur, en vivant la réalité d’être soignant. Ce sont aujourd'hui quelques petites fenêtres que j'ouvre en peinture et en récits.

FIP radioFenêtres sur intérieur soignant
00:00 / 01:56

Il a perdu sa chaussure

Il a perdu sa chaussure. Son unique chaussure. Il n’est plus question de paires, depuis qu’il a été amputé, il y a 3 semaines. Complication de son diabète. Assis sur son lit, il s’agite, la cherche des yeux. Sans sa chaussure et sans aide, il ne se sent pas capable de se lever. Des gestes qui étaient anodins, il y a quelques semaines, lui semblent à présent insurmontables.

(...) Lire la suite du récit 

IMG_7002.jpeg

Celui de la maison

Elle a sonné 26 fois en une journée.

26 fois.

Pauline a compté.

Ça fait une fois toutes les demies-heures en moyenne.

Si les 20 patients du service sonnaient à la même

fréquence, l’équipe serait appelée presque toutes les minutes. Intenable.

(...) Lire la suite du récit

IMG_7005.heic

Blanche Neige

Certains profs me font perdre patience, c’est

épidermique.

Pendant longtemps j’ai résisté, posant des questions, demandant des clarifications, tentant de reformuler… En vain, on n’y comprenait rien. Ou pire : c’était complètement faux. Je bouillais intérieurement. J’ai fini

par abandonner.

(...) Lire la suite du récit

IMG_6992.heic

Le silence se fait

Quand elle entre dans la salle, le silence se fait.

Son rouge à lèvres aujourd’hui est étincelant.

Elle est en talons, tailleur, chemisier fluide et porte un foulard de soie noué comme une cravate.

Elle glisse, légère, jusqu’au bureau et nous sourit.

(...) Lire la suite du récit

IMG_6998.jpeg

Il fera un bon médecin

Elle n’a vraiment pas de chance.

On m’a prévenue : « Déjà ce cancer qu’elle a, il est super rare. Mais alors là, le deuxième qui vient de se déclarer, encore plus. Quant à la combinaison des deux, laisse tomber, c’est le deuxième cas dans le monde. ». Je me demande comment on peut dire avec autant d’assurance qu’il y a seulement deux cas dans le monde.

Cette patiente est donc un cas.

(...) Lire la suite du récit

IMG_6980.jpeg

En douceur

Elle n’a pas 30 ans.

Et il y a peu d’espoir de guérison.

Pourtant elle nous sourit à chaque instant, dès qu’on entre dans sa chambre.

Même si la nuit a été scandée de douleurs insupportables et de nausées, elle nous annonce avec douceur le matin comme si de rien était : « non merci, je ne suis pas sûre que le petit déjeuner va passer aujourd’hui ». Et toujours avec son sourire.

(...) Lire la suite du récit

IMG_6983.jpeg

Sur la table

Thérèse rentre de vacances ce matin-là, avec un paquet de chouquettes. Entre générosité et rituel.

Ici ou ailleurs, un paquet de chouquettes offert est la promesse d’un peu de douceur partagée.

A l’hôpital, il annonce cette pause du matin, un petit déjeuner qu’on prend ensemble, avec celles et ceux qui n’ont eu pas le temps, ou pas la force, de le prendre à la maison, le réveil ayant été trop matinal.

(...) Lire la suite du récit 

IMG_7011.heic

Quelques jours plus tôt

On lui avait proposé des soins palliatifs quelques jours plus tôt.

Devant cette possibilité, elle s’est enfermée derrière un mur de résignation. Elle passait sa journée au lit, refusait de faire sa toilette, répondait à peine quand on se préoccupait de savoir comment elle allait. Elle nous avait fermé la porte d’accès à son intériorité.

(...) Lire la suite du récit

IMG_7008.heic

Ça ne se fait pas

Nous sommes à la fin du mois de janvier, l’hiver est déjà bien installé, les journées trop courtes. C’est le tout début de notre formation. Un mois de cours, intense et désorganisé, a réduit notre énergie et notre patience comme peau de

chagrin.

La promo a fait connaissance, certes, mais de manière superficielle. Des petits groupes sont formés, juste pour se sentir moins seul. La confiance n’est pas encore complètement installée.

(...) Lire la suite du récit

IMG_6995.heic

Tout le monde est fatigué

TD de physiopathologie, vendredi matin.

On entame la nième pathologie de ce cycle de formation.

On a survécu aux cours sur - en vrac - le diabète, les

cancers, la BPCO, les maladies infectieuses, la

schizophrénie, l’AVC, …

Et nous sommes encore là, légèrement anesthésiés,

certainement résignés, et surtout dociles à entamer la découverte de cette nouvelle pathologie annoncée sur notre emploi du temps par un acronyme : la SEP.

(...) Lire la suite du récit

IMG_6989.heic

Existe pour elles

Elle veut qu’on l’appelle par son prénom, Colette. Et surtout pas de Madame. Son « je n’ai jamais été mariée » résonne comme une fierté.

J’imagine une femme qui a été puissante. Elle parle de son passé à la radio, de ses articles, des hommes qui prennent toute la place, des femmes qui sont infectes.

Malgré nos nombreuses conversations sur ce sujet, il est difficile de cerner quel y a été son rôle, mais il en reste un sentiment de lutte et de fierté.

(...) Lire la suite du récit

IMG_6986.heic

Les brins, un à un

Quand on est dans un amphi, on ne voit que des dos.

Dans notre amphi d’aides-soignantes, je ne vois que des dos et des tresses.

Des tresses d’une diversité étonnante.

Diversité de couleurs : brun, or, ocre, blanc, rouge, violet…

Diversité de formes : ronds, carrés, triangles, vagues, croix…

(...) Lire la suite du récit

IMG_6976.heic
bottom of page